Vers une guerre des étoiles sino-américaine

Article


Le test récent d’un missile balistique intercontinental vient de consacrer les débuts de la toute nouvelle United States Space Force (USSF, Force spatiale des États-Unis), sixième branche des forces armées américaines. Ce lancement de longue portée désigne bien sûr un adversaire stratégique précis : la Chine.

C’est, véritablement, un nouvel acte de l’arsenalisation de l’espace qui vient de se jouer. Avec le lancement par l’US Space Force, le 5 février dernier, d’un premier missile balistique intercontinental de test à ogive thermonucléaire — Minuteman III — les États-Unis s’affirment de plus en plus comme puissance-clé de l’espace. Lancé depuis la Californie, le Minuteman a parcouru environ 6 800 kilomètres, avant de terminer sa course dans un atoll pacifique des Marshall, Kwajalein.

Le commandement américain cherche bien sûr à minorer tout lien entre ce spectaculaire lancement et l’affrontement grandissant avec la Chine. Il n’en reste pas moins que ce tir marque une avancée notable dans l’établissement d’une force spatiale. Au-delà du lancement, la constitution de l’US Space Force représente un coup de force du président Trump face à l’US Air Force, qui ne souhaitait pas l’existence de ce sixième département des forces armées américaines.

Succédant à l’United States Space Command (Commandement spatial des États-Unis), l’United States Space Force bénéficie d’un budget annuel d’environ 740 milliards de dollars. Dotée de 16 000 militaires et civils, elle vise à la protection des satellites et engins spatiaux américains. Cette création de l’USSF s’inscrit dans le cadre d’une hausse significative des armes électroniques, capables de désactiver les satellites.

Les États-Unis, naturellement hégémoniques en la matière, ne sont toutefois pas seuls. La Chine teste naturellement de semblables complexes antisatellites. Des puissances moyennes comme l’Inde et la Russie en expérimentent de même, tandis que l’Iran réfléchit à se constituer une force similaire.

Le précédent « SDI » sous Reagan

Cette course aux armements rappellera bien sûr un précédent : la Strategic Defense Initiative (SDI, Initiative de défense stratégique) créée durant les années 1980 par le président Reagan. Ce dispositif faramineux, et qui en sera resté au stade de la théorie, avait été mis en place pour endiguer la puissance militaire soviétique. La SDI était alors sensée stopper tout missile ennemi tiré en direction du sol américain, ce qui aurait induit une rupture dans l’équilibre de la terreur.

L’USSF telle que mise en place par Trump semble aujourd’hui constituer une nouvelle SDI, non plus en direction de la Russie bien sûr, mais de la Chine. Gérard Araud, ancien ambassadeur de la France aux États-Unis, l’analyse ainsi, ajoutant par ailleurs que le président américain rompt « avec une vision de l’espace comme un milieu démilitarisé, et régi par le droit international ». En effet, en vertu du Traité de l’espace de 1967, ayant établi les fondements juridiques de l’exploration spatiale, le cosmos est librement accessible à tous les États, qu’aucun, au reste, ne peut s’approprier.

Article initialement publié en russe sur Strategicon

0 comments

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *